Prétexte à…

faire des taches, rebelles, forcément,
improviser sur la peinture humide,
patauger, s’enliser, déraper dans les virages,essayer l’inutile,
libérer la main gauche, brouiller les pistes, chercher l’invisible, sans en avoir l’air,
rêver de couleurs impossibles,
tromper les apparences,
peindre le temps qui passe,
voyager sans billet, en solitaire,
se passer des mots,
descendre avant l’arrêt complet,
perdre conscience,
chercher ce que je cherche.

Les traces, les signes et les marques du temps m’interrogent et m’inspirent. Celles des rochers, des vieux murs décrépits et maintes fois repeints, où apparaissent parfois mappemondes ou silhouettes, l’écorce des arbres, la surface oxydée des métaux, les graffitis…

Longtemps l’appareil photo a été mon outil favori. Il m’a permis de découvrir, d’observer, de m’approcher, d’apprivoiser ma timidité. J’ai aimé jouer avec le subjectif, figer un instant fugace, une émotion. Construire des images, mêler lignes, zones d’ombre, mouvement et lumière.

Mais au fil du temps, le tirage photographique m’a semblé froid, trop net, d’une surface trop lisse.

La peinture m’a amenée à une écriture moins « parfaite », plus personnelle. J’aime la gestuelle et la tactilité qu’elle suppose. Jouer avec des superpositions de couches, en transparence ou en épaisseur, auxquelles j’ajoute parfois collages, empreintes et écritures mystérieuses.
Entre abstrait et figuratif, je représente par évocation des êtres humains, espèce d’animaux mal élevés, ou bien des bêtes imaginaires qui ont des choses à dire. Je peins les désordres du monde, ou pour m’en consoler, un univers de rêve et de fantaisie…